Du mercredi 7 au mardi 13 avril : Dans les collines de Transylvanie, de Viscri à Hunedoara en passant par Sibiu.
Au total, nous avons fait maintenant 8900 km à vélo depuis le départ.
Cartes, photos et journal de voyage de la semaine :
Mercredi 7 avril : Surprise au réveil après le beau temps d’hier et le soleil qui tapait sur les chemins boueux : thermomètre en dessous de zéro et flocons qui recouvrent Viscri. Nous allons visiter l’église fortifiée du village, un vrai château fort. C’est une particularité de toute la région, les habitants construisaient ces églises entourées de tours et de murs d’enceinte et se réfugiaient à l’intérieur avec leurs biens les plus précieux en cas d’attaque des Tatars ou des Turcs. Assez impressionnant sous la neige, comme dans un film en noir et blanc.
Elio a le même problème à une de ses roues que Justin en Bulgarie : il faut la changer, mais on ne trouve un réparateur de vélo qu’à Sibiu, à 150 km. On met le vélo d’Elio et toutes les sacoches dans la voiture de JP, Justin fera le parcours seul. Aujourd’hui, nous n’avons que 45 km jusqu’à Sighișoara. Route enneigée, puis le beau temps revient doucement.
A Sighișoara, vieille ville fortifiée sur la colline, nous sommes dans un grand appartement à l’ancienne trouvé par JP. Après la nuit d’hier à la ferme, on poursuit notre retour au milieu du siècle dernier ! Le soir on se fait une assez longue séance de travail à trois pour préparer l’entretien en visio prévu en fin de semaine avec Bruno Latour. Qu’avons-nous retenu des interviews de lui qu’on a entendues ? Que lui dire de notre expérience ? Que lui demander ? Ses thèses ne sont pas évidentes à comprendre au premier abord, surtout qu’on ne passe pas notre temps à écouter France Culture.
Jeudi 8 avril : Depuis Sighișoara, Elio et JP font l’aller-retour à Sibiu pour apporter le vélo à réparer. Elio le récupérera le lendemain. L’après-midi, on se balade dans la vieille ville de Sighișoara et on travaille.
Vendredi 9 avril : En route pour Sibiu, les uns en voiture, l’autre à vélo. Justin part tôt et on se retrouve dans la matinée pour visiter une autre église fortifiée, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, à Biertan.
Ensuite, le trajet est relativement plat, Justin, allégé des sacoches, file comme le vent.
Une fois arrivé à Sibiu en voiture avec JP, Elio va récupèrer son vélo dans l’après-midi.
Justin arrive assez tôt pour qu’on prenne le temps de bien préparer le rendez-vous avec Bruno Latour. A 20h (heure locale) connexion sur WhatsApp. Il est très sympa, s’intéresse à notre projet, nous pose des questions. On lui fait part de notre expérience du COVID et de nos réflexions de voyageurs de proche en proche en Europe, de notre conviction que la prise de conscience écologique doit s’accélérer après les confinements, pour changer nos habitudes de consommation sur une terre qui trouve ses limites plus que jamais. On s’interroge avec lui sur les biens matériels dont on pourrait se passer et notamment sur la question des réseaux, incontournables pour notre génération – nos téléphones sont d’ailleurs l’outil permanent de notre voyage et de nos échanges – alors que l’impact en consommation d’énergie devient considérable. On aime bien son optimisme, moins décourageant que d’autres pour ceux de notre âge. Il parle de JP en disant « votre Mentor », mais JP nous dit qu’on est plus proche d’Ulysse avec notre Odyssée autour de l’Europe que de Télémaque qui grandit à Ithaque…
A propos, demande Justin ce soir-là au dîner, de même qu’on pose la question de savoir si le bateau d’Ulysse est toujours celui du départ quand les pièces qui le composent sont toutes remplacées progressivement, le vélo d’Elio est-il toujours le même que celui avec lequel il est parti ?
Samedi 10 avril : On se repose un peu, puis on se balade dans la belle ville de Sibiu. Terrasses, soleil, passants qui flânent… un air de printemps bien agréable.
En fin de journée, après avoir été faire des courses, JP et Elio vont filmer un rap sur une jolie place calme, Justin reste à l’appart pour téléphoner. Pendant qu’Elio et JP repèrent le décor et commencent à tourner, un couple de français s’arrête. Elle filme le rappeur avec son tel, il fait de superbes photos en noir et blanc avec son Leica. Elle se présente et nous donne sa carte : Ambassadrice de France en Roumanie… Nous avons une longue conversation sympa tous les quatre sur la Roumanie et le Tour d’Europe à vélo. Belle rencontre.
Dimanche 11 avril : Le voyage continue vers l’ouest. Un paysage de collines, un peu monotone, mais quelques bourgs assez beaux, souvent avec des églises fortifiées. Enfin des premiers signes du printemps, avec quelques aubépines en fleur. Il fait beau et sec, alors on décide de bivouaquer en fin de journée et on fait un feu pour la soirée. JP ne peut pas rester avec nous, car du vendredi au dimanche, le couvre-feu est à 20h, mais il trouve un hôtel bon marché à 2 km.
Lundi 12 avril : Une journée très ensoleillée et plus chaude. Bientôt, une route avec beaucoup de camions. Des motels un peu glauques se succèdent, avec des filles sur le bord de la route… On termine par un assez long chemin de campagne, qui monte un peu trop puis redescend, mais nous évite les zones industrielles autour de Hunedoara et leur circulation.
Nous allons ensuite avec JP au rendez-vous avec notre hôte, à Deva, dans un bar très animé en terrasse, où il n’y a presque que des 25-30 ans. Le COVID n’a l’air de poser de problème à aucun d’entre eux. JP garde son masque. Avec sa caméra et sa casquette, il se fait à peine remarquer… Guglielmo est un jeune ingénieur italien qui a voyagé dans le monde entier, très sympa, il connaît tout le monde ici – il travaille sur un projet dans le coin depuis 2 ou 3 ans. On ne va chez lui que vers 21h30. Il nous propose un apéro avec un alcool “maison”, JP doit partir très vite à cause du couvre-feu. On mange un peu tard, mais la soirée est très sympa.
Mardi 13 avril : Réveil matinal, car Guglielmo part travailler à 8h. On va visiter le Castelul Corvinilor (Château des Corvins) à Hunedoara, très impressionnant. JP apprécie beaucoup le joueur d’archiluth avec qui il parle de musique élisabéthaine…
Ensuite on va faire des courses et du coup on ne fait qu’un court trajet l’après-midi, pour aller poser la tente au bord d’un lac, site gâché par des constructions touristiques moches ou d’autres abandonnés à moitié construites, protégées par des grillages et des chiens. Le bord d’en face, sur lequel on a la vue, est plus sauvage. Il fait gris, puis pluvieux.
Au revoir JP ! Pour nous le voyage va se poursuivre vers le sud…
Vos textes et photos me procurent un vrai sentiment d’évasion,amord un grand merci pour ça ! Bientôt la barre des 9000 km, bravo ! Courage les garçons !
Merci ! On devrait atteindre les 9000 km demain, mais on attend les 10 000 pour fêter ça…